(2) Le Mécanisme européen de stabilisation
A la suite du sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro du 7 mai 2010, le Conseil « Ecofin »(45) des
9 et 10 mai 2010 a décidé de mettre en action un dispositif de soutien
inédit, baptisé Mécanisme européen de stabilisation (MES), appuyé sur
deux outils :
– le
Mécanisme européen de stabilité financière (MESF), qui permet à la
Commission, après décision du Conseil à la majorité qualifiée, en vertu
de l’article 122 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne
(TFUE), d’emprunter jusqu’à 60 milliards d’euros ;
– le
Fonds européen de stabilité financière (FESF), créé pour l’occasion,
doté d’une capacité d’emprunt de 440 milliards d’euros, mobilisable
uniquement par un accord unanime des Etats membres y contribuant.
Ce potentiel total de 500 milliards d’euros est complété par 250 milliards susceptibles d’être prêtés par le FMI.
Ce
dispositif expirant au 30 juin 2013, les chefs d’Etat et de
gouvernement, au terme des sessions du Conseil européen des 24 et
25 mars et des 23 et 24 juin 2011 – qui était essentiellement consacré à
cette question – ont mis en chantier une révision du TFUE. Son
article 136 serait amendé, afin de créer un mécanisme permanent de
stabilité financière.
Source : touteleurope.eu.
Le MES pérennisé présentera les caractéristiques suivantes :
– sa dotation par l’UE sera maintenue à 500 milliards d’euros ;
– il sera « activé d’un commun accord » –
c’est-à-dire à l’unanimité des Etats membres participant au vote, les
abstentions ne faisant pas obstacle à l’adoption de la décision –, afin
d’accorder des prêts ou d’acheter des titres de dette souveraine sur le
marché primaire(46) ;
– l’octroi de cette assistance financière « sera subordonné à une stricte conditionnalité » ;
– un prêt du MES bénéficiera du statut de créance privilégiée, « qui ne sera inférieur qu’à celui des prêts du FMI » ;
– un
pays jugé insolvable sur la base des analyses de la Commission
européenne, du FMI et de la BCE devra négocier un plan de
restructuration global avec ses créanciers privés pour revenir à un
endettement supportable ;
– sur l’insistance de l’Allemagne, il sera possible de faire participer le secteur privé au mécanisme « sous une forme appropriée et proportionnée » et « au cas par cas ».
La
ratification de cette modification n’est cependant pas encore acquise,
eu égard aux problèmes d’acceptabilité politique qu’il soulève dans
certains pays.
(3) Un test réputationnel déterminant
Il
n’en demeure pas moins que la solidarité européenne, depuis un an, a
été une réalité : l’UE a déjà mobilisé pas moins de 45 milliards
d’euros, le 28 novembre 2010, en faveur de l’Irlande et de 52 milliards
d’euros, le 15 mai 2011, en faveur du Portugal. La situation de la Grèce
est plus problématique, les 110 milliards d’aide internationale en sa
faveur dans un premier temps, le 2 mai 2010 – 80 milliards de prêts
garantis pour trois ans par les Etats européens et 30 milliards du FMI –
ne couvrant guère que la moitié des échéances financières auxquelles le
pays devra faire face. Les deux autres Etats sous programme d’aide
internationale ne sont pas non plus sortis d’affaire, d’autant que les
taux d’intérêt des plans de soutien font peser une lourde charge sur
leurs budgets nationaux, en particulier l’Irlande, où la dette publique
devrait atteindre son pic en 2014.
Les
attaques répétées contre les obligations souveraines de la Grèce, de
l’Irlande, du Portugal et plus récemment de Chypre ou de l’Italie, ainsi
que les dégradations successives des notes attribuées à ces pays par
les agences de notation, ont nécessité l’organisation d’un sommet
extraordinaire de l’eurozone, le 21 juillet 2011, au terme duquel une
aide supplémentaire de 158 milliards a été accordée à la Grèce pour
couvrir intégralement son déficit de financement, avec un mise à
contribution du secteur privé, par le biais d’échanges et de rachats de
dette. La France est le premier pays de la zone euro à ratifier ce
second plan de sauvetage, le 8 septembre 2011, à l’occasion d’une
session parlementaire extraordinaire.
L’agenda européen de 2011 comporte aussi un événement important pour l’euro : le changement de gouvernance de la BCE, le 1er novembre
2011. Pour succéder au Français Jean-Claude Trichet, un consensus s’est
en définitive dégagé assez facilement en faveur du gouverneur de la
Banque d’Italie et président du Conseil de stabilité financière (CSF),
Mario Draghi, nommé pour huit ans.
Fin
juin, le FMI prévoyait que la croissance européenne atteindrait 2 % en
2011. Cela dit, avec la hausse de l’inflation et la multiplication des
plans d’austérité imposés par les circonstances, la consommation devrait
être en berne. En outre, les dépenses de construction ont connu un
infléchissement au cours de l’année, de même que les investissements des
entreprises en nouvelles technologies, du fait de la baisse de leur
profitabilité. Le 8 septembre 2011, la BCE a d’ailleurs revu ses propres
prévisions de croissance à la baisse : elle devrait se situer dans une
fourchette de 1,4 à 1,8 % en 2011 et de 0,4 à 2,2 % en 2012. Sont en
cause, la dégradation de la confiance et la persistance de la crise des
dettes souveraines.
Même
si la crise n’est pas terminée, loin s’en faut, avec notamment les
risques de faillite et de sortie de la zone euro qui continue de planer
sur la Grèce, l’UE s’est donc donné, dans un premier temps, les moyens
de réussir un test réputationnel déterminant. Comme toujours lorsqu’ils
se trouvent au pied du mur, ses dirigeants ont su faire preuve d’esprit
de responsabilité et de cohésion pour trouver un consensus. Si la
situation européenne est tendue – une croissance de seulement 1,8 % est
anticipée, au mieux, pour 2011 –, la BCE a tout de même pu prendre le
risque, le 7 juillet 2011, de remonter ses taux d’intérêts directeurs de
25 points de base, portant le taux des opérations principales de
refinancement à 1,5 %, pour tenter de juguler le rythme d’inflation dans
la zone euro, qui tournait autour de 2,5 % en glissement annuel depuis
plusieurs mois.
La
démarche du « semestre européen », cycle annuel de surveillance
coordonnée de la discipline budgétaire dans les Etats membres instauré
en 2011, est également de nature à stabiliser l’économie européenne et à
consolider la zone euro. La réforme de la gouvernance économique de
l’UE(47),
à travers le renforcement du Pacte de stabilité et de croissance, qui a
été votée par le Parlement européen le 28 septembre 2011 et approuvée
par le Conseil « Ecofin » le 4 octobre 2011, poursuit le même objectif.
Le
début de panique boursière intervenu durant l’été et l’aggravation
ininterrompue de la crise des dettes souveraines ont cependant dégradé
les perspectives de l’économie européenne et placé l’UE au cœur
des préoccupations des membres du G20, eu égard à l’impact se sa santé
sur la croissance mondiale. Le Conseil « Ecofin » des 16 et 17 septembre
2011 s’est pourtant conclu sur un constat de semi-échec, faute de
mesures fortes contre la crise financière dans la zone euro et
concernant la mise en œuvre
du second plan d’aide à la Grèce – la décision de versement de la
sixième tranche du premier plan a même été repoussée d’un mois.
Un
mois avant le sommet de Cannes, la France se trouve donc dans la
situation d’essayer de convaincre le monde d’adopter des mesures de
régulation coordonnées anti-crise, alors que l’association continentale à
laquelle elle appartient n’est pas encore parvenus à faire émerger des
solutions durables pour s’extraire de ses difficultés économiques
internes.
La
séance photo pour la postérité lors de la signature du traité le 11 juillet 2011,
et notre petit Barouin à nous tout content comme ses collègues de signer l'arrêt de mort de son pays et de nombre de ses concitoyens.